Richard Ferrand : qui est-il vraiment ?
« Tout est bon pour une exploitation politique et électorale (…) mais peu importe, les gens me connaissent, ils savent mon travail, ils savent mes convictions et ils savent mon honnêteté ». Voilà comment le tout fraîchement nommé ministre de la Cohésion des territoires, Richard Ferrand, tente de s’extraire de la tempête médiatique qui l’accable.
Le 1er scandale du quinquennat Macron
Les faits qui lui sont reprochés, initialement percés à jour par le Canard enchaîné n’ont pas fait scandale immédiatement. Et même si l’opposition politique redoublait de vigueur dans l’entretien de la polémique, la justice n’a pas souhaité s’en mêler jusqu’à récemment. Le premier scandale du quinquennat Macron fait bien sûr quelques ravages, mais pour le moment le gouvernement fait totalement bloc derrière Richard Ferrand et si certains demandent sa démission, le premier concerné a assuré que ce ne serait pas le cas.
Le procureur de la République de Brest a finalement décidé d’ouvrir une enquête, après la sortie dans la presse « d’éléments complémentaires susceptibles de mettre en cause Richard Ferrand ». La justice qui avait jusqu’alors résisté à la pression médiatique concernant « l’affaire Ferrand » a finalement cédé et se saisit du dossier suite à « la révélation par la presse d’éléments complémentaires susceptibles de mettre Richard Ferrand en cause ». Ce sont surtout des soupçons de conflit d’intérêts qui pèsent sur le ministre de la Cohésion des territoires. Alors qu’il était Directeur général des Mutuelles de Bretagne et cherchait de nouveaux locaux pour un centre de soins à Brest, le conseil d’administration de la mutuelle a choisi parmi trois propositions une adresse louée par une société immobilière, la Saca qui n’existait pas au moment où elle a obtenu le marché. Cette entité est en fait la propriété de la compagne de Richard Ferrand, Sandrine Doucen, qui aurait déposé les statuts après la décision et acheté les locaux dans la foulée. A noter que le premier ministre Edouard Philippe a déclaré : « Un ministre mis en examen devra démissionner, il n’y a aucune ambiguïté là-dessus ».
Un homme qui devient politique sur le tard
Avant de savoir jusqu’où ira ce ministre fraîchement élu, flash-back sur son cursus professionnel puis politique. Lorsqu’il est nommé, Richard Ferrand est député du Finistère et secrétaire générale du mouvement En Marche. Il a accompagné Emmanuel Macron durant sa marche vers l’Elysée. Il a également été celui qui a dévoilé les premières investitures du parti et a usé de son tact pour contrer certaines attaques de campagne. L’homme ne vient pas de la politique : un cursus hypokhâgne à Toulouse l’amène à terminer des études de droits à Paris puis il se lance en tant que journaliste pour la Dépêche du Midi, Centre-Presse, Le Monde ou encore Auto-moto. A 26 ans il bifurque vers le graphisme en prenant la direction d’une agence. Deux ans plus tard il créé un cabinet de conseil en communication. Finalement c’est une rencontre qui l’amènera à la politique, lorsqu’il propose à Kofi Yamgnane ancien secrétaire d’Etat aux Affaires sociales et à l’intégration de devenir son conseiller en communication, en 1991. En 1998 il obtient son premier mandat électoral en tant que conseiller général du Finistère, un poste qu’il conservera treize années. L’homme est clairement attaché au parti socialiste bien qu’il refuse d’être limité à un courant précis. Il a d’ailleurs soutenu Henri Emmanuelli puis François Hollande et Martine Aubry. En juin 2014 il faisait partie des quelques adhérents PS à réclamer une réorientation de la politique gouvernementale dans le cadre du projet de loi de finances rectificatives. C’est son indépendance qui lui fait rencontrer Emmanuel Macron. Ce dernier lui a commandé un rapport sur ce qui est devenu la loi Macron. Richard Ferrand est à ce moment nommé rapporteur général du texte. A noter que le 6 avril 2016, alors qu’il est toujours en poste à Bercy, Emmanuel Macron lance son mouvement En Marche!, lors d’une réunion publique à Amiens. Le seul député PS présent dans la salle est… Richard Ferrand.
Des chantiers d’envergure pour le ministre de la cohésion des territoires
Les experts de l’immobilier avait largement faire sentir leur colère à l’annonce de l’intitulé du ministère qui se pencherait sur les problématiques du logement. Pourtant c’est bien Richard Ferrand qui hérite du portefeuille dédié au logement. Une urgence semble réunir les acteurs de l’immobilier : réparer les fractures territoriales (centre-ville en voie de désertification, rénovation des banlieues, créer un « choc de construction » dans les zones tendues, etc.) L’enjeu principal, comme le soulignait Emmanuel Macron dans les colonnes de Business Immo le 8 mai est « la rénovation pour revitaliser les centres-villes, éviter l’étalement urbain, réduire les charges des personnes aux revenus modestes et répondre au défi de la transition écologique. Les habitants vivent un sentiment d’abandon croissant, à mesure que les commerces ferment, que les logements se vident et que le patrimoine se dégrade. Cette désespérance peut pousser certains vers les extrêmes. Il faut agir. »
Le président a également annoncé une loi mobilité et logement pour l’automne prochain dans laquelle devrait figurer le « bail mobilité », cette mesure instaurant un bail de 3 ou 6 ans destiné à des personnes en stage, mission ou mutation professionnelle afin de leur permettre de leur faciliter la recherche d’un logement. Richard Ferrand a d’ores et déjà rencontré Jacques Chanut, directeur de la FFB (Fédération française du bâtiment). L’occasion d’évoquer la question du dispositif Pinel et du prêt à taux zéro qui doivent arriver à échéance en fin d’année. « Ce sont des produits essentiels au maintien de l’activité qui est repartie dans le logement neuf, et il est pour nous primordial d’avoir une visibilité plus lointaine que la fin d’année », avait déclaré Jacques Chanut. Aucune information n’est encore divulguée quant à une potentielle prolongation de ces dispositifs, pourtant Richard Ferrand s’était prononcé en ces termes à ce sujet :
« Après six jours de prise de poste, tous les arbitrages n’ont pas encore été réalisés. Mais par expérience, je sais à quel point les politiques de « stop and go » sont nocives. Et j’ai conscience qu’il ne faut pas attendre les discussions budgétaires de fin d’année pour indiquer aux professionnels si les dispositifs sont pérennisés ou remis en cause.«
Le ministre a également dit qu’il pariait sur la pérennisation du PTZ, ajoutant : « beaucoup a été fait sur le plan législatif et réglementaire, des résultats ont été obtenus, il faut les consolider. Le secteur du logement et de l’urbanisme ont besoin de stabilité pour permettre à chacun d’y voir clair. Mais cela ne veut pas dire que rien ne sera modifié. » Le ministre a notamment fait savoir qu’il souhaitait simplifier les normes en matière de construction.